Alors que les derniers rayons du soleil brillaient dans le ciel de la cité ducale, le mardi 12 avril 2022, l’Ombrière était pleine comme un œuf. La salle accueillait Ginette Kolinka, rescapée du camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau, qui y a raconté ses souvenirs devant les quelques 500 spectateurs présents. Tous ont retenu leur souffle face au témoignage glaçant de cette grande dame, témoin de l’horreur des camps. « Je représente surtout toutes mes camarades qui ne sont jamais revenues. Quand on m’entend parler, ce n’est rien à côté de la réalité des camps », lance-t-elle en préambule de cette conférence-débat organisée par la radio associative Fuze et animée par l’historienne Valérie Igounet. « J’ai eu la malchance d’être née dans une famille juive et une personne prénommée Hitler, détestait les juifs et a décidé de tous les tuer comme on tue la vermine », poursuit-t-elle sobrement.
Le récit de l’horreur
Sans détour mais avec quelques pointes d’humour, Ginette Kolinka raconte la fuite vers la zone libre, son arrivée à Avignon, où elle reste avec sa famille plusieurs années, mais également son arrestation par la Gestapo et sa déportation, en avril 1944. Sans tergiverser, elle décrit les traitements inhumains qu’elle a vécu dès son arrivée au camp et la honte qu’elle a ressentie, nue et tondue. « Les nazis ont tout pensé pour humilier les juifs ». Ginette Kolinka raconte aussi les derniers moments qu’elle a passé avec son père et son frère Gilbert, au moment de descendre des trains, quand elle leur a proposé de monter dans les camions pour qu’ils puissent se reposer, sans savoir qu’elle les envoyait vers les chambres à gaz.
Conférence de Ginette Kolinka à l'Ombrière
Le temps semblait filer dans l’Ombrière tant l’audience était suspendue au récit de Ginette Kolinka. Après quasiment 1h30 de monologue qui s’est conclu par sa libération en avril 1945 et ses retrouvailles avec sa mère et ses sœurs, la nonagénaire a répondu aux questions du public. « Tout ce que je vous raconte est vrai mais est-ce que vous me croyez ? Parfois, dans ma tête, tout défile comme dans un film. Je lis des récits d’autres déportés pour confirmer ce que je raconte, confie Ginette Kolinka. N’oubliez pas que le fil conducteur de tout ce qui s’est passé, c’est la haine. La réalité des camps est bien pire que tout ce que j’ai pu vous dire, tout ce que vous pourrez lire ». Le courage de la survivante a été applaudi à de nombreuses reprises malgré sa gêne palpable. « Ce n’est pas une gloire d’avoir été déportée. Je me considère comme une victime et non comme une héroïne. Je n’ai rien fait, je suis juste née juive et je me suis faite arrêter car j’étais juive ».
La conférence-débat sera à retrouver prochainement en podcast sur le site internet de Radio Fuze.