Son récit est vif et constant. Depuis une vingtaine d’années, Ginette Kolinka raconte son histoire, «celle de tous les juifs». C’est par cette entame qu’elle a débuté son témoignage, devant des élèves de 3e du collège Trintignantsuspendus aux détails de son passé qu’elle revit à chaque fois. «Comment me trouvez-vous ?», lance-t-elle aux collégiens. «Normale». «Bien non, je ne l’étais pas, à l’époque je ne représentais rien pour un homme, Hitler».
Chaque mot pèse pour la survivante des camps qui aujourd’hui, à 97 ans, ne se voit pas comme une héroïne mais «une victime».
"Ce 13 mars 1944, la Gestapo est à la maison"
Des passeurs qui vont aider sa famille à quitter Paris pour gagner Aix-les-Bains puis Avignon grâce à des faux papiers, du convoi du train à bestiaux, de la cruauté et de la faim, la rescapée des horreurs nazies livre tout. Et sans aucune anicroche. Puis, vient ce terrible jour du 13 mars 1944, où elle vit à Avignon, après avoir quitté la capitale quelques semaines auparavant. «Ce jour-là, c’est encore l’hiver, mais il fait un temps magnifique, très agréable, se souvient-elle. Il est midi, Ginette est avec une de ses sœurs et une cousine. Elle est tirée au sort pour aller manger. Je vais à la maison, rue Joseph-Vernet, ajoute-t-elle. Je n’ai rien vu de spécial sur la route, ni devant la maison. J’ouvre la porte et il y a trois messieurs». La suite fait froid dans le dos, comme son arrivée à Drancy, puis au camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau au mois d’avril 1944. «J’ai été tatouée avec un numéro, le 78 599, je n’ai jamais su ce qu’il signifiait». Des décennies plus tard, ce numéro est toujours visible sur son bras.
À vous d'être les passeurs de mémoire"
En novembre 1944, Ginette Kolinka est transférée d’Auschwitz-Birkenau à Bergen-Belsen, un camp de concentration, avant de travailler dans une usine de février à avril 1945, date de son rapatriement.
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Ce moment poignant a vu le jour grâce à Fuze, radio locale et associative et l’aide du professeur d’histoire Stéphane Boze et de la professeur-documentaliste Isabelle Meric, porteurs du projet pour le collège.
Après plus d’une heure et quart de récit et de questions, Ginette Kolinka s’est adressée aux élèves, leur demandant d’être «les passeurs de mémoire». Nul doute qu’ils le feront.